Histoire
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La petite histoire
Guerre 39-45
Histoire de la tombe du sergent Radbourne
Arthur Henry Radbourne
Récit
3 avril 1943, base militaire de Kirmington, dans le Lincolnshire, en Grande-Bretagne. En début de soirée, vraisemblablement vers 19h30, nous référant au registre des opérations du 166è escadron, le bombardier Wellington Mk.X immatriculation HE 631 AS-V décolle pour une mission de largage de mines sous-marines dans les environs de la rade de Lorient, sur les routes des sous-marins allemands qui entrent et sortent de leur base.
A son bord, cinq tout jeunes aviateurs. Les sergents :
- Arthur Henry Radbourne, 21 ans : pilote,
- Eric William Aldridge, 32 ans,
- Wallace Carter,
- Thomas Luscombde, 22 ans,
- Jack Stock.
Au cours de cette mission de nuit, la Flak (DCA) allemande est active. Le bombardier est repéré, mitraillé. L'avion est perdu, mais le jeune pilote parvient tout de même à faire en sorte que le crash lui laisse le temps de s'extraire de la machine, une brassière de sauvetage autour du corps. En pleine nuit, en pleine mer (il se trouve environ à 12 ou 13 miles de la côte), seul survivant de l'équipage qui a dû couler avec l'appareil (nous sommes au début du mois d'avril, dans une eau encore très froide), c'est une lente et désespérante agonie qui aura raison de son courage et de son héroïsme. Il meurt d'hypothermie. (Il semble que sa seule vraie blessure soit une jambe fracturée lors du crash).
Wellington
Le lendemain matin, Joseph le Torrec (1911-1995), patron pêcheur propriétaire de l'Ange Gardien, chalutier à voile appareille du port de Brigneau après avoir obtenu des Allemands les autorisations nécessaires à l'exercice de son gagne-pain. (Des centaines de soldats allemands se trouvaient stationnés à Moëlan, notamment à Kergroës).
Poussé par un fort vent du nord, le bateau met le cap plein sud. A une distance de l'ordre de 12 ou 13 miles nautiques, Joseph le Torrec et son équipage de cinq hommes "tombent" littéralement sur le corps du sergent Radbourne, surnageant grâce à la bouée de sauvetage. Le jeune homme est mort d'hypothermie depuis plusieurs heures déjà.
Il est hissé avec précaution dans l'embarcation et ramené aussitôt à Brigneau où les Allemands s'emparent de sa dépouille et la placent dans un local à Malachappe, sous bonne garde. L'occupant exige alors des témoins du drame d'organiser un ensevelissement discret du jeune pilote. (Il venait tout juste d'avoir 21 ans, il était engagé volontaire, comme la totalité des effectifs du "Bomber Command". Pendant cette période, 55 573 très jeunes hommes ont ainsi sacrifié leur vie pour contribuer à la défaite du nazisme).
Mais les choses ne se passent pas comme prévu : la nouvelle se propage vite et le lendemain, la population de Moëlan-sur-Mer, plus particulièrement celle de Brigneau et de ses alentours, se rend en masse à l'église et au centre ville pour exprimer son émotion et sa gratitude au jeune soldat.
Les Allemands ne l'entendent pas de cette oreille, ils refusent de livrer le cercueil et dispersent la foule en tirant quelques coups de feu en l'air.
Le lendemain matin, au point du jour, le jeune pilote de la Royal Air Force est inhumé dans le cimetière de la ville en catimini, sans témoins, mais cependant après avoir reçu les honneurs militaires de la part des Allemands, pratique courante dans leurs rangs.
Après la guerre, l'occupation allemande étant terminée, la population de Moëlan a témoigné pendant un "certain temps" sa compassion et sa gratitude au jeune pilote.
Sa tombe a été fleurie et les gens venaient s'y recueillir... pendant quelques années.
Et puis la vie a repris son cours, avec ses impératifs.
Pour des raisons que nous ignorons à ce jour, la famille restante du jeune homme, ses trois soeurs aînées (il était par ailleurs orphelin), n'ont jamais pu se rendre sur sa tombe, à l'exception d'une fois, en 1976.
Les "autorités" locales , les associations patriotiques, auraient pû prendre le relais mais le temps s'est écoulé , un certain mélange et amalgame des différents évènements aériens de cette période à ajouté une certaine confusion. La sépulture et le sort tragique du jeune soldat sont tombés dans l'oubli et le silence des cimetières pendant 69 ans.
(Hormis la mise aux normes britaniques de la pierre tombale par la Commission des Tombes de Guerre du Commonwealth).