MEMOIRES ET PHOTOS DE MOELAN

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Moëlan - Archéologie

La lande de Kerglien et ses deux menhirs

Cette lande, qui est au S.-O. du bourg, en est séparée par un vallon médiocre, au fond duquel serpente le ruisseau de Damané (ce ruisseau se jette dans l'Océan au fond du petit golfe de Merrien). Elle forme une colline inculte, élevée dans sa partie supérieure et parsemée de nombreux blocs de granit, qui sont plus ou moins considérables, sans être cependant volumineux. Dans quelques endroits, le rocher qui constitue le fond du sol nous offre la singularité de s'élever en lames parallèles, exactement verticales, alignées du N.-O. au S.-E. Lorsqu'on les brise, on voit l'intérieur du granit d'un joli rose clair, couleur qu'il doit à la teinte de son feldspath, ainsi que ceux des côtes de Trégastel et de Notre-Dame-de-la-Clarté, près de Péros, au nord de Lannion (je ne connais encore en France de ces granits rouges que dans ces deux seules localités, et cette roche se trouve ainsi analogue à celle des carrières de la haute Egypte dont on a fait l'obélisque de Luxor ; mais celle de Moëlan s'en distingue par son mica souvent disposé par couches.). Je n'en connais pas d'autres encore de cette couleur dans notre province.

Je dois faire observer, au sujet de la position redressée ou lames granitiques, qu'en les voyant par leurs extrémités on pourrait être induit en erreur et les prendre au premier abord pour des pierres monumentales, c'est-à-dire ainsi plantées par nos ancêtres : il y en a même qui peuvent laisser de l'incertitude, surtout lorsque ces pierres sont isolées et d'une certaine élévation.

Je n'ai découvert, au sujet du nom Kerglien appliqué à cette lande, que les mots bretons gliz et glizien, qui s'en rapprochent le plus. Le premier signifie en français rosée du ciel, et le second, glizien, la goutte, maladie. Alors le mot glien serait résulté de la suppression de la syllabe zi, dans le mot glizien ; et le nom de Kerglien eût été donné à la lande parce que nos ancêtres goutteux y seraient allés se frictionner contre l'un ou l'autre des menhirs, pour se guérir de leur maladie, ainsi que nos paysans vont encore se frotter contre la pierre de Saint-Philibert.

Quant au mot gliz, rosée du ciel, on ne peut pas considérer comme telle cette multitude de pierres superficielles dont le sol est tout parsemé.

Cette lande se trouve entre la route de Douélan, du côté de l'E., et celle du château de Placamenn, à l'O. ; elle est traversée d'orient en occident par celle de Bélon ; c'est au bord de celle-ci, du côté du N., que ce trouve le menhir nommé Men-Kerglienn, ou la pierre de Kerglienn, que nous allons décrire le premier. Comme il méritait d'être dessiné sous deux aspects, il se trouve figuré dans nos planches du côté du S.-S.-E. et l'O.-N.-O.

 

1° Menkerglienn

C'est un bloc vertical, haut de 12 pieds 3 pouces, obtusément arrondi à son sommet, mais qui parait plus resserré en pointe lorsqu'on le voit du côté de l'O.-N.-O. Etant orienté de l'E. demi N.-E. à l'O. demi S.-O., ses faces principales sont exposées au S.-E et au N.-O. ; celles-ci sont larges de 5 pieds 10 pouces à 4 pieds et demi au-dessus du sol, mais le monolithe vu de ce côté nous offre sur son bord oriental un resserrement qui forme une espèce d'étranglement de plus de 1 pied de profondeur, par lequel il se trouve divisé en deux parties d'égale longueur. C'est en même temps de ce côté que la pierre a le moins d'épaisseur, n'ayant que 14 pouces au plus, tandis que sa face opposée, c'est-à-dire l'occidentale, a 2 pieds 10 pouces.

Bellevue

Nous remarquons encore que le côté de ce bloc exposé à l'O. est plane et presque rectiligne dans toute sa hauteur, au lieu de présenter un étranglement et d'être arrondi en ses bords ainsi que la face au S.-E. Celle au midi est la plus unie, la plus plane, n'ayant que quelques dépressions peu profondes. Sur celle au N., on voit une concavité qui descend obliquement de sa partie supérieure jusqu'à 4 pieds de haut au-dessus du sol, en se rapprochant de plus en plus de son bord occidental.

On a cru rencontrer des caractères bizarres exécutés sur cette pierre ; mais en l'examinant avec attention, j'ai reconnu que ces prétendues lettres n'étaient autre chose que la partie feldspathique du granit, disposée par bandes plus ou moins tortueuses.

Comme ce menhir est placé dans l'alignement de la haie en terre qui borde le chemin, M. Mauduyt, pour le conserver, a fait reporter celle-ci en dehors du monument, afin que, se trouvant sur le domaine public, il n'ait plus à redouter que le vandalisme des ingénieurs du gouvernement, qui tant de fois déjà ont détruit d'importants monuments celtiques pour réparer les chemins. Le relèvement de sa position l'établit au S. demi S.-O. du bourg de Moëlan, dont il est séparé par un petit vallon.

 

2° Menhir appelé Michir-Cam, ou la Pierre-Crochue

Lorsqu'on monte sur la haie qui borde la route, en face du menhir précédent, on en aperçoit un second au midi, à une certaine distance, dans le prolongement de la lande. La partie supérieure de cette pierre bizzare s'élève au-dessus de toutes les autres dont le terrain continue d'être parsemé.

Cette pierre est érigée au milieu d'un vaste plateau rocheux dont le niveau se trouve un peu inférieur au sol de Men-Kerglienn ; mais au lieu d'être vertical comme celui-ci, le Men-Cam s'incline vers l'occident sous un angle de 78 degrés. Il est haut de 10 pieds 2 pouces, du même granite, coupé obliquement à son sommet et orienté du N.-O. au S.-E. Ses faces principales, qui sont N.-E. et S.-O., sont larges de 6 pieds inférieurement ; mais comme la pierre va en se rétrécissant dans sa partie supérieure, elle n'a plus qu'un pied de largeur à son sommet.

Ses faces au nord et au midi sont les plus étroites : elles n'ont que 3 pieds 4 pouces à la base du bloc et 14 pouces environ à son extrémité supérieure. Son épaisseur est de 18 pouces dans sa partie moyenne.

Croaziou

Ce bloc, au lieu d'être en ligne droite comme les autres menhirs, nous présente la singularité d'être arqué vers son sommet, dans une direction du midi au nord, de manière à paraître un peu en forme de faucille ; c'est une structure dont je ne connais pas encore d'autre exemple. Toute sa face rentrante est entièrement plane, large de 14 pouces au sommet du bloc, et de 3 pieds 4 pouces à sa base. Sa vive arête sur son angle au N.-E., au lieu d'être continue, nous présente une entaille qui commence en pointe à 3 pieds environ de hauteur, et va en s'agrandissant ensuite de plus en plus jusqu'au niveau du sol. Il est connu dans le pays sous le nom de Michir-Cam, qui signifie la pierre crochue, parce qu'on dit ici, par corruption, michir pour menhir ; c'est un travestissement du mot menhir que je n'ai rencontré encore que dans cette seule partie de la Bretagne.

On remarque à la base de ce monolithe, du côté du N.-E, quelques pierres médiocres, dont une est placée comme pour le maintenir exactement dans le degré d'obliquité qu'on lui a donné. Cette pierre y est introduite entre sa base et celle d'une crête du roc granitique souterrain, qui s'élève à côté du menhir. J'ai fait aussi deux dessins de ce monolithe.

Le Men-Cam se trouve entre le chemin de Pen-Prat, de Chef-du-bois, Kersécol, et celui de Bélon, la Porte-Neuve et Pont-d'Aven. Il est érigé sur un plateau aride, nu, qui produit seulement de la bruyère et du petit ajonc, l'Ulex autumnalis. Mais tandis que cette plaine est si nue, si déserte, ses alentours sont très boisés et nous offrent diverses métairies. Si nous reportons nos regards de l'occident vers le midi, les arbres y composent un épais rideau, par-dessus lequel on aperçoit une partie du golfe qui forme l'entrée des rivières de Pont-d'Aven et de Bélon.

Au nord, c'est le bourg de Moëlan, au-dessous duquel on découvre vers l'E. la petite église dédiée à saint Roch et à saint Philibert ; elle est entourée de chênes touffus qui donnent à ce bassin l'aspect d'un bocage, et celui-ci vient s'unir à un bois de pins de la plus belle venue, lesquels ne sont plantés que depuis un demi-siècle sur la lisière de la lande.

Je ne dois pas omettre que cette lande est presque couverte, ainsi que les environs de Trégunc, près de Concarneau, de ces blocs granitiques superficiels qui l'ont fait regarder comme un carneillou celtique par M. de Fréminville. Mais l'exploitation de ces mêmes blocs, qu'on a entreprise et que l'on continue depuis quelques années, a fait connaître, ainsi que j'en avais la certitude, que ces réunions ne proviennent que des causes géologiques ; et la preuve qu'elles ne sont pas des monuments funéraires, ainsi que l'a prétendu notre confrère, c'est qu'on n'a jamais trouvé par-dessous aucune espèce d'inhumation.

Quant aux parties du roc souterrain qui s'élèvent en crêtes verticales, celles-ci sont parallèles, dirigées du N.-O. eu S.-E. : lorsqu'on les voit par leur extrémité, on les prendrait alors pour de petits peulvans. Quelques-unes de ces roches sont rongées inféroeurement de manière à se présenter sous une forme de céphalodes, c'est-à-dire de masses plus ou moins en forme de têtes.


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