Botanique : la fleur de pomme de terre

 

Camille Kerlan (juillet 2021)

 

                Un jour, un inspecteur nous rendit visite à l'école publique de Kermoulin. Un inspecteur, c'était quelqu'un de très important. II commandait au maître d'école, donc il devait savoir plein de choses. Il avait trouvé tout seul la route pour venir du Croiziou, tourner à Langroês, passer devant la chapelle de Saint-Cado, puis le lavoir et arriver dans la cour de notre école !

                Il demanda si quelqu'un dans la classe connaissait la pomme de terre. Ce pouvait être la classe du cours moyen. Toutes les mains se levèrent. Nous avions en effet, tous et toutes, aidé à planter des pommes de terre lors des vacances de Pâques, soit au champ, soit dans nos jardins.  C'était parfois des demis tubercules et nous étions étonnés de constater que ceux-là aussi donnaient des touffes aussi entières que les autres. Il fallait veiller à ce qu'au moins un germe – le bon germe - pointe vers le ciel et que ce soit ni trop profond, ni pas assez.

                Dès la mi-juillet, nous prenions notre petit panier pour aller dans le  jardin le remplir de pommes de terre nouvelles. Elles étaient petites mais vous savez comme nous que c'était les meilleures ; on pouvait même manger la peau, au moins quelques morceaux. La grande récolte  au champ, derrière le cheval et la charrue, c'était à  la fin des grandes vacances aux alentours du pardon de Lanriot, un incontournable qui, pour les Moëlanais annonçait la fin de l'été.

                Nous connaissions aussi un dévoreur des feuilles de pomme de terre : le doryphore. Une année, il y en eut partout (1955? 1956?) ; à Kergostiou, ils traversaient même la route et nous les écrasions avec nos sabots.

 

                Les volontaires ne manquèrent pas pour répondre à l'invitation de l'inspecteur d'aller au tableau dessiner une fleur de pomme de terre. Tous s'appliquèrent à dessiner une belle corolle avec de jolies pétales en soignant les arrondis. Tous furent recalés ! Cela commençait bien, l'inspecteur semblait approuver, et puis brusquement il déclarait que NON, ce n'était pas çà ; l'élève n'avait plus qu'à regagner son banc. Deux filles essayèrent des bâtons de craie de couleur, rose pour l'une, violette pour la seconde, mais le verdict fut le même que pour les garçons. Cela faisait sourire et même rigoler notre maître d'école.

 

                Toute la classe fut gentiment invitée à compter le nombre de pétales d'une fleur de pomme de terre. Nous vous laissons le faire vous-même ; pour vous aider, voir les images.

                Ce jour-là, nous apprimes aussi le mot "butter" ; nous connaissions l'opération qui se faisait pendant que nous étions à l'école, au mois de mai, mais nous ne savions pas que cela se disait "le buttage des pommes de terre". Quand on vous dit qu'un inspecteur, c'était quelqu'un qui savait plein de choses !