Les Moëlanais
Biographies
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Ce que je fis ne cherchant plus ailleurs. Au début de Février 1915, j'embarquais sur le Paquebot "Pérou", de la Compagnie Générale Transatlantique effectuant la ligne St-Nazaire-Colon. Comme j'étais ministre, j'avais le bon poste de troisième quart, remplaçant mon camarade Louis le Bloa du deuxième quart. Je vous assure que le métier ne valait pas la peine à 90 francs par mois, car il fallait prendre des gardes mains pour sortir de la chaufferie, tellement la chaleur était torride, surtout entre Fort de France (aux Antilles) et Colon (dans la République du Panama), risquant encore les croiseurs de poche Goëben et Breslau, patrouillant à notre recherche car nous transportions des troupes de nos colonies, navigant tous feux éteints. Débarqué pour fatigue générale, fin de Décembre et hospitalisé à la clinique Poussier, à Saint-Nazaire, j'eus la surprise d'être versé comme beaucoup de mes camarades de la classe au 117è d'Infanterie du Mans, pays de la Soeur qui me soignait.
Quelques jours après, un autre ordre de mobilisation me fut adressé, m'invitant à rejoindre le 3è Dépôt à Lorient et versé dans la Marine, vu que j'étais Inscrit définitif.
Rentré le 11 Janvier 1916 au Dépôt, je fis six semaines de formation et ensuite dirigé sur Brest pour embarquer sur le Croiseur La Gloire, bateau-école des électriciens. Après trois semaines de cours sur un autre Croiseur de même série, Le Dupetit-Thouars. Breveté électricien au mois de Juin 1916, je fus embarqué comme électricien sur le Contre-torpilleur Stylet, de la 6è Escadrille de patrouille de l'Atlantique (Mon premier galon a été cousu par le sympathique Philippon, de Kergroës).
Pour armer les Chalutiers mobilisés pour faire la patrouille et le dragage des mines, le Ministre de la Marine, par une circulaire demandait de faire des radios parmi les électriciens et les timoniers, je mis mon nom et fut désigné pour suivre le cours sur le Calédonien. Au bout de trois mois ayant satisfait à l'examen, je fus désigné sur Dunkerque pour embarquer sur un patrouilleur de la 6è Escadrille des patrouilleurs de la Manche et Mer du Nord. Tantôt sur le Chalutier Charles, chef d'escadrille, tantôt sur L'Ascension, de la même Escadrille.
La vie n'était pas rose, risquant d'être coulé par les Destroyers ou sauté sur les mines. Rentrant dans le bassin pour effectuer le ravitaillement en vivres et charbon, nous n'étions pas plus en sécurité. Bombardé continuellement par les avions allemands et obligé d'aller dormir dans les souterrains. Si nous pouvions appeler cela dormir ?
Le 11 Novembre 1918, nous nous trouvions en patrouille au large de Zuidcotte, quelle joie que j'eus lorsque l'Amirauté nous adressa un télégramme de rentrer, l'Armistice est signé. Joie profonde dans les coeurs de l'équipage, encore une fois sauvé.
Immédiatement cap sur Dunkerque où personne n'était malade en arrivant à terre. Hélas ! mon séjour à terre ne fut pas long. Je fus désigné pour surveiller les pêcheurs entre Dieppe et le Havre, pendant la saison de pêche. Trois mois se sont écoulés. J'étais débarqué et dirigé à la station de Bléville, près du Havre, pour effectuer le trafic commercial avec les navires de commerce et de pêche, le boulot ne faisant pas défaut ni de jour ni de nuit. Pendant le quart nous ne pouvions pas nous endormir ... sic ...
Remplacé par des opérateurs P.T.T., je fus désigné pour embarquer sur le cargo Portsmouth, de la Compagnie Dieppe-Newhaven.
Nous faisions les voyages jusqu'à Londres toutes les semaines.
Ma libération approchant et comme j'avais droit à une permission de 40 jours, on me débarqua et désigné au 3è Dépôt pour être démobilisé. Quoique quartier-maître radio et admissible second-maître, je déclinais l'offre proposé pour rengager.
Démobilisé le 11 Janvier 1920, je rejoignis mes foyers. Oh ! pas pour longtemps. Comme j'avais goûté la vie d'officier radio du commerce, je demandais à la C.R.M. un emploi sur un navire.
Quelques mois après, je reçu un télégramme pour rejoindre Le Havre prendre des ordres.
Dirigé sur Cardiff, j'embarquais sur le Général Lyautey, de la Compagnie Marocaine de Navigation à Vapeur, beau bateau de dix mille tonnes et commandé par le Capitaine Ordenneau, de Nantes.
Quelle fut ma joie d'embarquer à Cardiff sur la vedette du Consul pour rejoindre le navire en rade.
C'était à bord, l'heure de l'apéritif et tous les officiers du pont, la femme du Commandant, le Consul et sa femme étaient réunis dans le salon ; le Commandant me désigna ma place que je gardais pendant mon embarquement, c'est-à-dire six mois.
Le repas fut copieux et cordial. J'en ai gardé un bon souvenir.
De Cardiff, chargé de charbon, nous avons pris la direction de Colombo où la cargaison était destinée. Après avoir traversé le canal de Suez, une épidémie s'est contractée à bord, en traversant la Mer Rouge. Trois membres de l'équipage, dont le chef cuistot sont morts et de ce temps là il n'y avait pas de cercueils à bord comme maintenant.
Contraints de les fiche à la mer et faire trois fois le tour comme d'usage, le drapeau en berne, nous avons gagné Colombo où nous sommes restés plusieurs jours pour le déchargement.
Appelé pour un fret de sucre, nous nous sommes dirigés sur Java et Sumatra, dans les Indes Néerlandaises, où nous sommes restés trois mois pour le chargement (Les petites Javanaises étaient très belles).
En mer, j'ai reçu un télégramme signalant au commandant que le chargement était vendu pour New-York. Mais le Commandant resta à son tour malade ce qui nous obligea de rentrer à Colombo où il a été hospitalisé.
Le Commandant en second qui était Capitaine au long-cours, et qui se nommait Le Merle, natif lui aussi de Nantes, pris le Commandement du navire.
Continuant notre voyage, je reçus après Suez un autre télégramme nous disant de rentrer à Alger.
En rentrant dans ce port, je me dirigeai au Siège de la C.R.M., Compagnie Radio dont je faisais partie, pour demander mon débarquement trouvant que le voyage avait assez duré.
Ce qui fut fait et remplacé par un autre radio de la même Compagnie qui se trouvait sans embarquement à Alger.
Je fus réglé et dirigé sur Le Havre pour embarquer sur le grand Chalutier Uranus, de la Maison Déro, du Havre.
Au mois de Février, nous sommes partis en Islande, faire un voyage qui a duré deux mois vu que le temps était souvent mauvais.
Je me rappellerai toute ma vie que nous allions nous mettre à l'abri aux îles Wesmann et nous ravitailler à Rekjavik, capitale de l'Islande ; là nous profitons de laver notre linge dans un petit ruisseau où l'eau était très chaude malgré que nous étions entourés de neige et de glace.
Chargement de morues, d'ânons, de flétans, au complet nous sommes rentrés à Bordeaux où après déchargement nous avons gagné Le Havre, notre port d'attache pour faire le carénage, les vivres et tout ce qui était nécessaire pur faire la campagne de Terre-Neuve.
Nous sommes partis fin Avril, commandés toujours par le Capitaine Allanic, de Sarzeau. Trois semaines après, nous étions à St-Pierre-et-Miquelon, complétant nos vivres et charbons, nous avons pris les bancs.
Après un mois de pêche, chargement au complet, nous sommes rentrés à Sydney (Canada), pour complétés vivres et charbons et prendre de nouveau la direction de Bordeaux pour le même trafic.
Rentré à Bordeaux au bout d'une quinzaine de jours de mer, car pour revenir la route était plus facile, et après le déchargement, nous avons rejoint Le Havre pour caréner et refaire le plein en vivres, eau et charbon, enfin tout ce qui nous manquait, puis reprendre le même trajet.
Au retour, je débarquais au Havre trouvant suffisamment assez fait. J'avais oublié de dire que le trafic radio ne manquait pas entre bateaux signalant pêche et position.
Je pris une permission et remerciai le C.R.M.
En arrivant à Moëlan, j'avais rencontré deux camarades qui rentraient dans la Douane, aussi d'après leurs renseignements je fis ma demande. Reçu à l'examen, je partis en même temps qu'eux et dirigé à la Direction de Charleville, de là, à la Capitainerie de Montherme et ensuite à la Brigade des Hauts-Buttes, près de la Belgique (Willerzie). Les filles étaient très chaudes malgré le froid et savaient traverser la frontière pour faire la fraude. Ce qui nous distrayait, trouvant moins long notre quart.
En 1921, je fus nommé par mes camarades, Secrétaire du Syndicat des Douanes actives à la Caserne des Hautes-Buttes, ce qui ne plaisait pas beaucoup à Monsieur l'Inspecteur Pommier, surtout c'était la formation du Syndicat. Ces Messieurs n'aiment pas beaucoup çà ... (sic).
Suivant le Cours Oudin, de Poitiers, par correspondance, je fus navré lorsque j'appris par le Capitaine Voizard, que j'étais boulé à l'examen. Je ne trouvais pas drôle vu que le Président des examinateurs était le fameux Inspecteur.
C'est après que je fus désigné pour la Brigade de Conslagrandville, distante d'une dizaine de kilomètres. Là, je fis connaissance d'une petite amie, fille également d'un Douanier en retraite et qui avait le joli nom d'I... P... Nos relations ne durèrent pas longtemps, une idée me passa par la tête et je donnai ma démission de la Douane pour revenir à mon ancien métier.
Je vois encore la jolie I... qui était venue me conduite à Charleville, agiter son mouchoir blanc sur les quais de la gare, car la petite croyait à mon retour ... sic ... Mais, hélas ! elle dût attendre longtemps car une fois que j'avais vu mes payses, j'avais oublié ma petite I... qui était pourtant très gentille, mais les hommes sont des égoïstes.
Après avoir pris quelques jours de repos dans ma famille, j'écrivis à la Radio Maritime pour un embarquement sur un Chalutier de Lorient.
Je ne tardais pas à recevoir un télégramme pour embarquer sur L'Albatros, de la Compagnie Lorientaise de Chalutage. Directeur Werhoven, je gardais ce bateau pendant trois ans, faisant tantôt des remplacements sur d'autres navires quand le bateau était en réparation.
Enfin je fus embarqué sur l'Amérique, de la même Compagnie et qui était le plus grand de la Flotille Lorientaise.
Tout à tour, je fis des embarquements sur presque tous les Chalutiers de Lorient car la C.R.M. fournissait des appareils et des opérateurs à toutes les Compagnies de Navigation.
En 1924, année de mon mariage, ce fut la grande grève qui dura trois mois, ce qui ne mettait du beurre dans les épinards. Enfin, je repris mon vieux Amérique jusqu'en 1927 où j'embarquais sur le Kerysa, de la Maison Scaviner, nouvel armateur et mon ancien patron.
J'ajoute dans l'équipage le patron François Scaviner, actuellement armateur et qui continua toujours le métier dur jusqu'à 55 ans, laissant après la place aux plus jeunes même à son fils qui continue comme son père le métier si dure surtout que le poisson devient de plus en plus rare.
J'ai gardé de mon ancien patron un très bon souvenir et lui sollicite de bien profiter de sa retraite très bien méritée.
J'avais oublié mon voyage de Terre-Neuve avec le Kermaria, au début de 1928. Voyage mouvementé à trois jours de Saint-Pierre-et-Miquelon, les crépines de la cale à poisson étant engagées, nous avons été obligés de rester en travers de la houle par mauvais temps et pendant 48 heures à vider la cale, avec des seaux, faisant la relève chacun son tour.
J'avais alerté le Chalutier Asie qui faisait la même route, pour nous porter assistance si besoin l'oblige. Heureusement que nous avons réussi à vider l'eau de la cale et ensuite faire fonctionner les pompes de cale.
Tout dégagé, nous avons repris la route de Saint-Pierre sans d'autres inconvénients.
Ce navire était commandé par le Capitaine Tocquet, de Riec-sur-Bélon, plus tard Armateur du Chalutier à moteur Rosbras et par le Capitaine de pêche Albert Scaviner, Armateur aussi plus tard du Kerysa.
L'équipage était de Moëlan-sur-Mer presque en totalité.
A Saint-Pierre nous avons débarqué le matériel destiné au Frigo de Saint-Pierre et exploité par la Compagnie Lorientaise en ce moment là.
Après 48 heures de stationnement nous avons repris la direction de Sydney pour charbonner et faire de la glace naturelle que nous prenions sur les buts de Sydney, ce qui prouvait que la température n'était pas celle des tropiques. Tout terminé c'était la direction des bancs de pêche, pêche très fructueuse puisque nous avons fait notre chargement en 48 h.
Après vivres et charbons nous avons pris la direction retour à Lorient, traversée de quinze jours environ.
Si c'était à recommencer, ce ne serait pas des voyages semblables que j'entreprendrais surtout avec des Chalutiers du tonnage du Kermaria (quoique ces petits bateaux tiennent aussi bon la mer que les Asie).
C'est de retour de cette campagne d'un mois et demi que j'ai embarqué avec le même Capitaine sur le Kerysa dont il devenait acquéreur.
J'ai continué jusqu'en 1936 où élu Conseiller Municipal de Moëlan-sur-Mer, j'ai quitté momentanément la mer, afin de pouvoir accomplir mes fonctions tout en étant Agent général d'Assurances de la Compagnie "La Paternelle".
Le métier ne nourrissant pas son homme, j'ai repris la navigation.